Règles de Français…

Bâtiment de l'Académie Française

Si vous lisez ce billet, peut-être que vous êtes un lecteur régulier – auquel cas, congratulations, vous faites partie d’un club des plus exclusifs – mais plus probablement vous avez suivi ce lien sur un forum, une plateforme sociale où vous avez rouscaillé sur la forme d’un commentaire ou d’un contenu, peut-être que j’en suis l’auteur.

Vu le Zeitgeist, l’objet de votre complainte est l’usage de l’une ou l’autre forme inclusive, ou bien un anglicisme quelconque alors qu’il existe un terme français que tout le monde ignore. Ou juste quelques fautes d’orthographes. Le fait qu’il y a des règles a été clamé.

La première règle est celle de la politesse. Dérailler une conversation avec des trivialités est impoli. Vous avez mis mal à l’aise vos interlocuteurs, et pour quoi ? Satisfaire votre égo, vous sentir supérieur ? Ou peut-être pour apporter votre position socio-politique à une conversation sans rapport ? Bref, des motivations puériles et médiocres.

Vous allez argumenter que vous l’avez fait pour le bien d’autrui, qu’il faut éduquer les gens. C’est très naïf, ou très hypocrite. Personne n’a jamais été convaincu de quoi que ce soit ainsi en-ligne. Cette pédagogie fonctionne peut-être dans une école, avec un adulte doté d’une autorité qui peut imposer quelque chose à des enfants. Je soupçonne que des taloches aident.

Mais soit, s’il faut faire fi de politesse et éduquer, éduquons. Vous avez tort. Toute personne compétente, i.e. des linguistes, des gens qui s’intéressent à la linguistiques, ou simplement des personnes qui ont le recul qu’offre le fait d’être polyglotte, le sait, ces règles que vous invoquez sont juste une construction éphémère, dont le but premier est d’établir une hiérarchie sociale (se pousser du cul). Vous n’avez pas ces compétences, vous avez une conception de la langue (le prescriptivisme) qui avait du plomb dans l’aile au XIXe.

Tel un fanatique religieux, vous vivez avec les chapitres des règles qu’on vous a fait rentrer dans la caboche, avec la crainte terrible que ces tables, ces exceptions péniblement apprises changent, que l’investissement émotionnel durement acquis passe en pertes et profits et que vous vous retrouviez en bas de l’échelle sociale. Si ces règles sont changeantes, combien d’année d’école sont vides de sens ?

Vous invoquez l’académie française, une assemblée d’incompétent séniles. Rappelons que sa raison d’être officielle est de publier un dictionnaire et que la dernière édition date de 1932, je doute que la 9e édition soit publiée de mon vivant. Peu d’institutions sont aussi admirablement improductives. S’il est un jour publié, ce dictionnaire sera de toute manière obsolète, les mots écartelés sur un siècle, un exercice absurde de futilité. On respecte les autorités à son image, je suppose.

Si vous invoquez l’académie, c’est évidemment très sélectif. Saviez vous que l’usage des accents sur les majuscules est obligatoire selon cette même académie ? Cette règle a toujours existé, mais il y avait une dérogation quand ce n’était pas techniquement possible. Cette exception, qui date des machines à écrire a été bêtement répétée jusqu’à ce que les gens croient que c’est une règle, c’est devenu l’usage. Un appauvrissement de la langue par ceux qui hululent contre ce même appauvrissement…

Depuis au moins vingt ans, tout appareil capable de se rendre sur un réseau social, un forum est parfaitement capable de produire des majuscules accentuées. Ne pas savoir utiliser son appareil, n’est pas une limite technique, juste de l’incompétence. L’accent a valeur orthographique. Vous avez probablement fait plus de fautes d’orthographe en-ligne que vous n’en avez corrigé.

Toujours pour parler de l’académie, saviez vous que l’usage des nombres tel qu’il est pratiqué en Suisse étaient la forme recommandée jusqu’en 1945 – dix ans après le début du dictionnaire actuel de l’académie. C’était la règle, et dans un univers de règles immuables, vous avez écrit (et prononcé) les nombres de manière erronée toute votre vie, et si vous n’avez pas compris un nombre énoncé de cette façon, vous avez exposé votre inculture et votre chauvinisme. Cette règle a été ignorée et abandonnée, et c’est l’usage qui a prévalu. Le même usage qui change à présent, et que vous prétendez arrêter avec vos gesticulations grossières.

Vous l’aurez peut-être deviné, ce sujet est chez moi une corde sensible, mais quand on a pour principe de bousculer les gens pour montrer comme on est important, parfois on se prend une baffe. Bien méritée, soyons honnête.

P.S. J’ai écrit cette note car je ne vois pas l’intérêt de polluer les discussion de forums avec ce qui est fondamentalement de l’éducation de base. Par principe, je ne répondrais donc pas sur le forum ou le réseau social ou j’ai mis le lien vers ce billet.

2 thoughts on “Règles de Français…”

Leave a Reply

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.