Apocalypses comparées…

Vieux Bunker

Comme j’ai grandit dans les années 80, l’apocalypse omniprésente était une guerre nucléaire. Sting chantait , chaque cave, chaque école avait son bunker. Le premier film politique que j’ai vu (ou compris tout du moins compris) était . Lorsque j’ai fait l’armée en 1991, le plan était encore de se cacher derrière un mur en cas de détonation nucléaire et de reprendre le combat avec masque à gaz et pèlerine NBC.

Aujourd’hui la guerre en général et la menace de nucléaire est moins omniprésente, même si le problème est loin d’être réglé. L’apocalypse au programme est le changement climatique. Ce que je trouve intéressant, c’est le contraste dans la manière dont cette nouvelle menace est traitée, notamment comparé à celles liées à la guerre froide.

La première différence est l’absence de déni. S’il y avait certainement des mouvements contre l’armée – notamment avec le mouvement pour une suisse sans armée – personne ne niait l’existence de la Russie ou des armes nucléaires. Les divergences étaient surtout sur le fait que ce soit une menace, et – le cas échéant – la manière de la gérer. À l’époque, une personne qui aurait fait ses recherches pour nier la réalité ou pour se déclarer expert en physique nucléaire aurait été traitée au mieux d’imbécile de mauvaise foi, au pire de traître. C’était le bon vieux temps.

La seconde différence est au niveau des moyens. Le budget militaire n’a jamais été négligeable, et c’est sans compter les dépenses imposées aux particuliers, que ce soit en terme de service ou d’infrastructure imposée. Depuis les années 60, la Suisse a construit près de 300’000 bunkers, pour une valeur de 12 Milliards de francs, ce qui donne quand même la bagatelle de 1400.- par personne qu’il faudrait probablement ajuster pour l’inflation et la valeur locative perdue.

L’utilité de ces constructions est très limitée, on peut y stocker du vin, peut-être y installer un carnotzet, ou en faire une salle de répétition pour un groupe de musique qu’on ne veut pas entendre. Ceux sous les écoles peuvent être utilisées en cas de catastrophe, mais on a visé large, plus de 100% de la population est couverte. Par contre, on a diminué le nombre de lits d’hôpitaux. C’est bête. En cas de transformation, ce ne sont pas exactement des installations facile à démanteler. Bref, la valeur de ces machins est faible, c’était surtout un gros cadeau au lobby de la construction.

Combien de propriétaires qui ont un abri sous leur maison rechignent pourtant à avoir un chauffage plus efficace, ou bien des panneaux solaires – combien invoqueront la liberté personnelle alors qu’ils ont complètement intégré l’idée du bunker inutile à la cave ou bien de mettre à disposition de l’état un mètre cube de stockage pour du matériel militaire, y compris des armes dangereuses.

Le paradoxe, c’est que si on considère un panneau solaire ou une pompe à chaleur du point de vue de l’armée des années 60, ils ont une valeur stratégique  : des maisons qui ne dépendent pas d’une resource stratégique étrangère, un système capable de produire de l’énergie de manière décentralisée et donc moins vulnérable. Une maison dotée de cellules photovoltaïques et d’une batterie serait idéale pour une station radio…

Lorsque les panneaux ont été installés au dessus de notre maison – l’appointé Wiesmann s’attendait vaguement à ce que le système d’aération de l’abri soit connecté directement à l’inverseur, après tout, c’est une machine qui devrait fonctionner même en cas de panne du système électrique – elle a une manivelle. Il n’en est naturellement rien, la doctrine militaire ne va pas s’adapter si vite au XXIe siècle, et, de nos jours, les pannes du système électrique sont rares et sans conséquences, comme on a pu le remarquer aux Texas et en Californie.

Je suppose que ces différences s’expliquent au niveau conceptuel, la guerre est un sujet bien enraciné dans la culture, après tout il y a des exemples dans la bible, qui ne contient aucun exemple de catastrophe naturelle causée par un comportement humain…

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