Cours d’hyper-mécanique de base

Schéma décrivant un saut hyper spatial, l'influence du facteur δ.

Le regard du professeur est posé, tel un prédateur, il ne bouge ni ne scille. Enfin le moment fatidique arrive, la trotteuse finit son voyage circulaire poussant à l’arrivée l’aiguille des minutes. La sonnerie retentit. D’un geste assuré il trace une ligne à la craie qui émet un crissement strident, réveillant le jeune homme à la veste rouge au troisième rang sur la gauche. Il y a une raison pour laquelle le professeur a insisté pour qu’il y ait une telle antiquité dans cette salle. Il commence son cours :

Aujourd’hui, je vais vous présenter les bases de la théorie des sauts par manipulation des horizons de Tzegoryne, en d’autres termes, des voyages hyper-spatiaux. Comme vous avez tous suivi le cours sur les manipulations des horizons, je ne répéterais pas la théorie ici.

En voyant l’air inquiet de la fille au cheveux blanc près de la baie vitrée, l’orateur de peut s’empêcher de sourire, si elle a l’assurance pour porter une second skin, la simple mention de la théorie des horizons la fait frémir.

Le voyage hyper-spatial se base sur une déplacement selon l’axe M, cet axe définit une dimension additionnelle à notre espace. Si on représente l’espace normal comme une droite (l’axe R), alors l’axe M est perpendiculaire à cette droite. Dans cet exemple, l’espace normal et l’axe M définissent l’ensemble du plan.

La craie crisse à nouveau et un schéma sommaire apparaît.

Schéma hyper-spatial

Ce schéma illustre le concept de saut hyper-spatial. Le point de gauche est vulgairement appellé le point de saut, celui de droite le point de résurgence. Une question qui se pose naturellement est pourquoi suivre une trajectoire qui parait plus longue si l’on veut aller plus vite. Il faut d’abord noter que le notion de distance selon l’axe M est assez complexe, elle ne peut pas réellement être mesurée en mètres ou en années lumières. La réponse peut être exprimée par analogie aux avions qui volent à haute altitude pour aller plus vite, de fait, voler plus haut implique faire un trajet plus long (en imaginant que l’on parte d’un point au sol pour rejoindre un point au sol), la motivation pour agir ainsi est de profiter de l’air raréfié en altitude, qui se traduit par un frottement réduit. Dans le cas du saut hyper-spatial le but est s’affranchir de certains contraintes physiques.

Imperceptiblement, différents activités ont vu le jour dans l’auditoire. Traffic de notes de cours, étude comparée de vestes de pilote, discussion sur le prochain examen de législation spatiale ainsi qu’une partie de cartes holographiques.

La profondeur dans l’hyper-espace est mesurée en Magritte (Ma). Cette unité est définie de la manière suivante : un objet situé a 1 Ma ne peut-être observé depuis l’espace normal (0 Ma). D’une manière générale, plus un saut est profond, plus il permet d’aller vite. Le problème de sauts profonds, c’est que le fait se trouver à plusieurs centaines de Magrittes s’accompagne d’effets divers. Sans entrer dans la polémique des choses qui peuplent l’hyper-espace, on peut dire avec certitude qu’un saut profond est dangereux. Il convient en effet de se rappeler que si le but est de se trouver dans un référentiel différent de notre espace normal, un vaisseau spatial, sa cargaison et ses passagers ne peuvent survivre dans ce référentiel exotique. Maintenir le vaisseau dans une bulle d’espace normal est le rôle des compensateurs de Lysenky. Sans ces compensateurs, le vaisseau serait soumis à des règles de physique très différentes de celles que notre réalité.

Les étudiants ont tous entendu des rumeurs, des légendes sur les choses dont le professeur refuse de parler : des créatures gigantesques et tentaculaires, des couleurs indéfinissables et hostiles, des tempêtes et des courants mystérieux. Tous ont entendu parler de rescapés de tels rencontres, certains fous, d’autres doués de pouvoirs mystérieux. Le professeur de pilotage est, selon la rumeur, une telle personne. On dit qu’il serait revenu inversé de l’hyper-espace, devenu gaucher et lisant de droite à gauche et ne sentant plus le goût du sucre.

Le schéma représente grossièrement un saut balistique il ainsi nommé car toute la trajectoire est déterminée au moment du saut. La trajectoire du vaisseau est entièrement déterminée par deux variables, la vitesse du vaisseau dans l’espace normal au moment du saut, et l’angle du saut. De ce fait pour n’importe quelle trajectoire, il existe une infinité de possibilités, à un extrême on trouve une trajectoire très tendue, qui ne s’enfonce que très peu, à l’autre on trouve une trajectoire « en cloche » qui s’enfonce beaucoup. Le choix du pilote est donc de choisir entre la trajectoire plate, lente et sûre, et la trajectoire profonde, rapide mais dangereuse.

Le principal problème des sauts balistiques est que plus longue est la distance, plus le saut sera profond. C’est pour cette raison que les moteurs semi-balistiques ont été développés. Ceux-ci sont capable de corriger la forme de la trajectoire. Cela offre trois avantages : premièrement cela permet d’avoir des trajectoires plus carrées, où le vaisseau plonge profondément dans l’hyperespace, se déplace à une profondeur constante et ne quitte ce niveau qu’à proximité du point de résurgence. Deuxièmement, cela permet de procéder à des corrections de trajectoire à proximité de la destination, et ainsi d’avoir un meilleur contrôle sur la position du point de résurgence. C’est pour cela que la plupart des nœuds commerciaux disposent de balises tachyoniques, leurs signaux servent de référence pour les corrections d’émergence. Enfin, troisièmement cela permet de changer de direction en cours de saut. En observant le saut d’un vaisseau doté d’un moteur balistique on peut déterminer une ligne sur laquelle se trouve le point de résurgence. Vu la densité stellaire, cela veut fondamentalement dire qu’on peut déterminer la destination d’un vaisseau qui saute.

Dans les derniers rangs, une vive discussion a commencé. Un étudiant asiatique affirme que la Fédération des Hautes Terres dispose de moteurs hyper-spatiaux plus avancés encore, permettant à un vaisseau de plonger dans l’hyper-espace en restant immobile dans l’espace normal. Un tel vaisseau pouvant de-facto se comporter comme un sous-marin, capable de disparaître et apparaître à volonté dans l’espace. Durant ce temps, le professeur rempli le tableau des équations qui dirigent les bases de la théorie des sauts.

Le calcul de trajectoire d’un saut hyper-spatial serait chose simple si notre espace était plat. Malheureusement, ce n’est pas le cas. La présence de corps massifs déforme l’espace, ce qui peut rendre plus simple ou plus difficile certain sauts. Considérons le cas d’un saut à proximité d’un corps massif, comme une étoile.

Schéma hyper-espace avec corps

Selon qu’on se trouve d’un côté ou de l’autre de l’étoile, la déformation de l’espace change complètement le calcul de trajectoire. La trajectoire bleue est beaucoup plus intéressante car elle permet de plonger rapidement et de se déplacer loin. La trajectoire rouge est beaucoup plus défavorable, la position oblige un saut profond, mais n’allant pas très loin. C’est pour cette raison que de nombreux pilotent préfèrent sauter « à travers » les étoiles.

Une main se lève, avec au bout une élève. Le professeur ne peut s’empêcher d’être fasciné par le complexe filet scintillant qui emprisonne les cheveux de celle-ci. Professeur, tous vos exemples partent de l’idée que le saut se fait au dessus de la ligne. Pourquoi ne pas sauter en dessous ?. Le professeur sourit, il aime qu’on lui pose des questions, surtout quand elle ne concernent pas les examens.

Très bonne observation ! Il serait en effet possible de sauter de l’autre côté. Le gros problème c’est que les règles de la physique de l’autre côté ont tendance à être encore plus défavorables au déplacement rapide que notre plan. Néanmoins l’idée d’un saut initial inversé utilisé comme tremplin de saut a été proposé par un un Siyani. Cette théorie n’a malheureusement pas encore pu être mise en pratique.

La déformation de l’espace fait que certains trajectoires sont tout simplement impossibles. Naturellement, la gravité n’est qu’un des facteurs multiples qui influencent la géométrie des sauts. En fait, le calcul de sauts reste une science expérimentale. Le meilleur outil pour ces calculs sont les tables de corrections. Ces tables sont établies à partir de différentes observations et nécessitent des remises à jour quotidiennes.

La sonnerie retentit, et l’ensemble de la classe s’éveille, de l’état solide, elle semble être devenue liquide et commence à s’écouler à travers les portes de l’auditoire. Le professeur profite des dernières seconde d’attention.

Nous termineront la leçon sur cette considération, ayez toujours des tables de saut à jour.

3 thoughts on “Cours d’hyper-mécanique de base”

  1. Bien entendu, je n’ai pas le même référen[tc]iel, du coup même si je trouve la démonstration passionante, j’ai sous la main un certain nombre de théories contradictoires…

    Parce qu’au fait, l’hyperespace, à un moment donnée, est suivit d’hyper-théories d’hyper-physique… Casse gueule quoi.

  2. Très sympa effectivement !
    Par contre, en faisant cuire mes pâtes je me demandais si les objets en déplacement dans le continuum ne seraient pas également soumis à un effort de frottement dont on pourrait calculer le Cm, par analogie avec le Cx (coefficient de traînée) … D’autre part l’hyper-espace n’aurait-il pas une viscosité mesurable, ainsi que des phénomèmes de turbulences ?

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