Organiser une soirée «murder»

Broderies!

Comme l’année passée, le réveillon aura été pour moi l’occasion d’organiser avec Angel une soirée de jeu grandeur nature, ce qu’on appelle souvent une murder, sauf que cette fois-ci il n’y avait pas de meurtre à élucider. C’est un style de jeu assez différent des parties de jeu de rôle de table que je fais plus régulièrement, si ce billet n’a pas pour ambition d’expliquer comment organiser une telle soirée, je trouve intéressant de noter les différences, mais aussi les approches qui ont l’air de marcher.

La principale différence entre une tablée de jeu de rôle, et une soirée avec vingt invités en costume et un buffet c’est que dans le premier cas, est le contrôle et l’influence du maître de jeu. Dans le premier cas, il y a narration, possibilité d’improvisation, de changement de plans, dans le second cas, l’histoire une fois lancée ne peut être fondamentalement changée, on a une unité de temps, de lieu et de personnages. La principale conséquence, c’est que toute l’histoire doit être embarquée dans le background des personnages et leur objectifs. Les objectifs et les indices initiaux sont le principal outil de l’organisateur, c’est par leur truchement que les différent personnages de la soirée sont connectés.

Deux considérations importantes dans l’organisation d’une soirée sont l’extensibilité et la redondance. Idéalement il faudrait y avoir une ébauche d’histoire entre chaque personnage présent, mais cela n’est pas gérable, pour n personnages, il faudrait ½n × 2 histoires, ce qui n’est pas gérable : pour 20 personnes, il faudrait écrire 200 histoires. C’est pour cela qu’il est important de diviser les joueurs en factions, on s’assure qu’il y ait une histoire entre chaque faction, et une histoire entre une fraction (disons la moitié) de chaque faction, avec quatre factions de cinq personnes, on n’a plus que 4 + (½ × 4 × 25 × ½), ce qui nous ramène à une trentaine d’histoires.

La bonne nouvelle, c’est qu’il faut de la redondance : il y a toujours des joueurs absents, distraits, ou qui partent sur des tangentes, cela veut dire qu’il est capital que chaque indice, chaque information, soit présente plusieurs fois. Après discussion avec Antoine, je pense que le nombre idéal soit trois fois, c’est à dire que le nombre de joueurs connaissant un fait, y compris ceux impliqués soit de trois personnes. Par exemple si Alice a transmis un message secret à Bob, il est impératif que Claire le sache. L’information ne doit pas être complètement redondante, on peut insérer des erreurs, des variations, suffisamment pour causer le doute et nécessiter des interactions. Par exemple changer un nom, remplacer la couleur mauve dans un nom par violet, ou rouge. Si cela veut dire qu’on peut réutiliser certains aspect de l’histoire, il faut bien admettre qu’il y a de la perte, certaines intrigues ne vont tout simplement pas décoller, c’est pour cela qu’il faut prévoir large.

Une autre observation notable, c’est que les accessoires sont importants. Je ne suis pas un grand fan des puzzles dans une partie de jeu de rôle sur table, car je trouve qu’ils cassent très rapidement le rythme, avec un seul joueur qui s’amuse, ils sont autrement plus efficaces dans ce genre de soirée, vu qu’il peut occuper un sous-groupe pendant un bon moment. Les participants ont en général beaucoup apprécié le matériel graphique, que ce soit l’argent utilisé dans le contexte ou des affichettes. Celles-ci ont eu beaucoup de succès, il s’agissait d’affiches Wanted avec les visages de certains participants. Ils ont l’avantage de poser les personnages de manière simple et directe.

L’autre observation c’est que ce genre de soirée implique une organisation assez lourde. En fin de compte, j’ai fait une schéma des différentes interactions entre personnages avec Omnigraffle, une feuille de tableur avec les différentes informations pour chaque joueur / personnage (associer une clef primaire à chaque personnage est une bonne idée), et enfin un long document texte avec les backgrounds (histoire de pouvoir faire du rechercher remplacer d’un seul coup). Avoir sur place mon laptop et une imprimante couleur aide beaucoup, de même qu’avoir tout le matériel de bureau (papier, enveloppes, ruban adhésif).

Une bonne idée d’Angel cette année était d’avoir une soirée en deux phases, une première avec les négociations, une seconde avec la course dans l’espace, ce qui était fondamentalement un mini jeu de plateau. Cela a permis aux gens fatigués de se désengager, et de finir sur une partie excitante et de minimiser la partie statique du debriefing.

Même si l’organisation est très importante, comme pour le jeu de rôle de table, il est très important d’impliquer les joueurs. S’il est possible de faire fonctionner une partie de table avec un MJ charismatique et des joueurs passifs, ce n’est simplement pas possible dans le cas d’une soirée. Il faut donc un maximum d’investissement des joueurs. C’est pour cela qu’il faut leur laisser des options que ce soit pour les costumes, ou s’ils ont des envies de rôles particuliers, c’est ça qui donnera le piment à la soirée.

2 thoughts on “Organiser une soirée «murder»”

  1. J’ai plus l’habitude des gn à grande échelle, genre monstre de 200~400 personnes, où la redondance et les incertitudes quant à la présence de rôles clés sont encore plus nettes. Avec JeuA, on a quelques recettes simples pour générer les rôles et proposer de quoi s’occuper aux joueurs. La plus évidente, c’est l’usage de rôles “template”, bien pratique pour préparer du matos pour les retardataires (qui appelle 3 jours avant le gn pour s’inscrire… y’en a plein…) ou les aliens (qui débarquent au gn sans s’être inscrits et exigent d’avoir un rôle complet, y’en a moins, mais y’en a quand même, surtout que JeuA ne fait pas dans le PNJ)

    Nous, ce qu’on fait, c’est qu’on prépare des intrigues principales, 3 ou 4, puis une foultitude de magouilles, plans débiles, et autres bazars occupatoires. On saupoudre de détails recyclables en intrigues de secours (genre les fleurs violettes dans le jeu de 2008) et on adapte/adopte les plans et éléments suggérés par les joueurs les plus motivés (il y a des plans foireux, mais aussi beaucoup de choses très très intéressantes qui peuvent complètement rediriger le sens du jeu, par exemple la monnaie parallèle des Zourd d’Apic, dans le gn de 1998)

    Sur le plan des costumes, je dirais que depuis que JeuA a commencé, en 1993, on a observé une très très nette amélioration de leur qualité. A croire que les gens ont redécouvert l’usage de la machine à coudre (mais c’est sans doutes aussi l’apparition de boutiques en ligne spécialisées qui a provoqué cette évolution)

Leave a Reply

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.